À quelques heures de la cérémonie des César, le cinéaste a  répondu à quelques-unes de mes questions concernant cette pluie de récompenses pour son dernier film :  « Un Prophète ».

Grand Prix au Festival de Cannes,Prix Louis Delluc,Prix du syndicat français de la critique, Prix du Meilleur film étranger aux BAFTA anglais, nomination aux  « Golden Globes », nomination aux Oscar, treize nominations aux César ? Comment réagissez-vous à ce succès ?

C'est très étonnant. Pourquoi ce film-là ? Je n'ai pas de réponse par rapport à cela, c'est très singulier, j'éprouve juste de la gratitude. On a l'opportunité de faire un film, tout ce qui vient après n'est pas envisagé. Cela vous procure un certain plaisir bien sûr, mais à la fois ça dit quelque chose dont j'ai dû mal à  tirer des conclusions définitives.

Quelle place accordez-vous à toutes ces récompenses ?

À l'origine du projet, cela n'existe pas. On fait un film car c'est un moyen de communiquer certaines choses que l'on à  a dire. On fait un film pour un public imaginé. Mon premier étonnement fut lors du Festival de Cannes parce que le film n'était pas encore terminé, n'avait pas encore été vu par le public, donc ce Grand Prix était pour moi un encouragement. Cela a eu pour effet de me calmer, de me rassurer.

Quelles sont les récompenses qui vous tiennent le plus à cœur ?

Tout compte. Le fait que le film marche, qu'il soit acheté et vu à l'étranger, la reconnaissance  académique, est aussi importante pour moi, mais peut-être pour des raisons « historiques » les prix décernés par la critique sont des prix qui m'intéressent particulièrement. C'est aussi cette réunion de récompenses qui me fait dire que j'ai fait un film de genre et cinéphilique, un peu à l'image de ce que je suis , venant de la place de scénariste avec  mon goût depuis toujours pour le cinéma de cinéphile. Ce  type de film de genre est le chaînon manquant, la couture qui réunit deux propositions.

Les Oscar  seront-ils la fin de cette belle histoire ?

Ce sera de cet ordre-là. Les Oscar sont la quintessence de ce que donne le cinéma américain même si je reste réservé sur le caractère industriel de la chose. C'est à la fois légendaire et vivant. Comme à Cannes, quand je suis monté sur  « l'estrade », j'étais très ému car j'y ai vu passer des grands noms du cinéma qui m'ont constitué. Les Oscar c'est cela, côtoyer des gens  pour qui j'ai une grande admiration qui vous ont inspiré, donné. Être là  me confirme que je fais partie de ce rouage. J'aime l'idée du cinéma comme une passation.

Quel est votre prochain projet ?

Je vais adapter deux nouvelles de Craig Davidson. Je commence à travailler dès mon retour des Oscar.

Catherine Esway