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Extraits choisis de Cadavres exquis dans le 7e Art de Marie-Christine de MONTBRIAL

CADAVRES EXQUIS DANS LE  7 e ART

Quatre créateurs du cinéma mondial

Marie-Christine de Montbrial

Extraits

 

Les hommes du 7e art, réalisateurs, producteurs, artistes, techniciens…connaissent bien la petite lueur qui s’allume dans les yeux de ceux qui les rencontrent : l’univers du cinéma suscite une curiosité immédiate même à une époque où la fabrication des films semble avoir révélé ses moindres mystères.

Les questions fusent :  « Vous êtes producteur ! Vous devez être riche ! »

« Vous produisez des films ? Mais est-ce que tous les metteurs en scène ont vraiment besoin d’un producteur ? »

 

Pouvoir, amour et argent ?

Cigares, tapis rouge, stars au bras ?

Sorte de banquiers un peu aventuriers ? Gestionnaires, mais aussi artistes ? Mais que font les producteurs ?

 

(...)

 

Selznich était insomniaque. Il dictait ses « mémos » à des secrétaires qui se succédaient en permanence près de lui. Le scénariste Sam Behrman raconte que, lors d’une discussion avec le producteur qui s’était prolongée jusqu’à trois heures du matin, il finit par lui déclarer qu’il devait aller se coucher. Alors qu’il

se dirigeait vers un cabinet où il avait déposé son manteau, David lui lança dans un éclat de rire : « n’entrez pas là-dedans, il y a une secrétaire morte à l’intérieur ». « La conférence prit fin dans les rires », conclut Behrman.

« Nombre de conférences avec David se terminaient ainsi. Car lire ses mémos critiques ne donne qu’une faible idée de sa personnalité. Même quand il rendait fous les réalisateurs qui travaillaient pour lui, il se montrait jovial, affectueux, chaleureux ».

 

Cette prolifération d’écrits qui nous passionne aujourd’hui avait quelques inconvénients pour ses contemporains.Tous ceux qui ont eu affaire à David O. Selznick, surnommé DOS, ont reçu ses missives célèbres (parfois plusieurs le même jour au même destinataire !). C’était même devenu une sorte de plaisanterie à Hollywood. Ainsi John Huston fut-il inondé de mémos pendant le tournage de « Plus Fort Que le Diable » ( « Beat the Devil »), où David n’avait pourtant aucun rôle direct. Jennifer Jones, qu’il avait épousée, tournait dans le film avec Humphrey Bogart ; il ne pouvait pas s’empêcher d’intervenir !

 « John Huston déchirait les mémos sans les lire. Puis un jour il concocta une longue réponse qu’il s’arrangea pour rendre ésotérique, mystérieuse, voire indéchiffrable dans son absurdité. Il y gagna un mois de répit ! »

Grâce à son obsession de la perfection, son énergie inépuisable et une volonté tyrannique compensée par un charme ingénu, Selznick réussit à accomplir son œuvre cinématographique mais aussi à nous expliquer comment. Réjouissons nous qu’il ait gardé des doubles de ses missives et toutes ses notes ! Devant nous se déroulent en détail les péripéties et les accidents de parcours de la conception et la fabrication d’un film : décisions à prendre, inquiétudes du producteur, choix des acteurs, problèmes de scénario, de réalisation, de distribution, problèmes humains et financiers, tous les sujets sont abordés dans ces correspondances sans équivalent. « Ces ‘memos’ révèlent en outre le processus créatif de certains des films les plus réputés de leur temps, et comment des comédiens relativement peu connus sont devenus des stars. »              

 Entreposées dans un bâtiment des Studios Universal après sa mort, les dossiers de Selznick furent ouverts au journaliste Rudy Belmer qui l’avait bien connu. Il s’enfouit deux ans et demi dans cet amoncellement de lettres, télégrammes, et autres notes et en 1972 fit paraître « MEMO », un volume de 600 pages de sélection des manuscrits légendaires du producteur.

Les ouvrages sur le cinéma sont innombrables. Mais on ne trouve nulle part mieux que dans les mémos de Selznick une relation à ce point précise de ce qu’implique la production d’un grand film. Ces correspondances uniques nous apprennent à nous retrouver dans la jungle des participants à une telle aventure…

Car c’est bien d’une aventure qu’il s’agit.

Selznick a connu la fortune et la ruine plusieurs fois. Il ne s’est pas fondamentalement enrichi au cours de sa vie. Beaucoup d’argent lui est passé dans les mains, mais son réel moteur était de réussir ses films. Il ne mettait pas son pouvoir dans l’argent. Il a aimé son métier jusqu’à s’y user à mort.

De ses écrits se dégage un portrait de producteur créateur qui s’expose sans trop de complaisance, un incroyable personnage de roman : « En lisant ce livre, j’ai compris que pour Selznick, pour un producteur-créateur, les notes, les lettres, les télégrammes jouent le même rôle que les carnets pour un écrivain. De jour en jour, d’heure en heure, les plus infimes détails du processus de création y sont enregistrésv- et nous sont ainsi révélés. Toute ses pensées, ses convictions, ses hésitations s’y expriment. Ce sont vraiment ses carnets de notes. »

Si un producteur possédait ne serait-ce qu’une petite moitié de son tempérament, il aurait déjà des chances de laisser un nom.

Tout film à travers les âges rencontre, chacun à son niveau et à son époque, des problèmes comparables ; malgré l’évolution considérable du métier de producteur, les grandes fonctions, ainsi que les choix à faire et les qualités essentielles pour produire sont restées les mêmes.

 

(...)

 

Aucun film n’est garanti d’avance. Les sujets les plus attendus, les plus grands acteurs, les réalisateurs les plus talentueux connaissent l’échec. La décision de produire est un acte basé sur une intime conviction.

Voilà sans doute pourquoi, en pleine hésitation, David O. Selznick répond à la suggestion pressante de Katherine Brown d’acheter les droits du roman :

« 25 mai 1936 : J’ai examiné « Autant en emporte le vent » et y ai réfléchi attentivement. Je pense que c’est une bonne histoire. Si nous avions sous contrat une femme qui puisse être la vedette idéale, je serais probablement plus enclin à l’acheter que je ne le suis aujourd’hui. Mais je pense réellement qu’il n’y aurait de valeur en tant que spectacle que si nous avions une telle vedette à notre disposition, ou si le livre avait un formidable succès de vente.

Le payer très cher aujourd’hui dans l’espoir qu’un des deux se produise est, je le crois, bien aventureux. Peut-être qu’une compagnie plus importante peut faire une offre d’achat aujourd’hui. Mais je ne crois pas que nous puissions prendre un tel risque. ……

J’ai le sentiment, par parenthèse, que le contexte historique est un handicap pour le livre, comme en témoigne « So Red the Rose » (Paramount 1935)...

Je suis tout à fait désolé de répondre par un non à votre enthousiasme pour cette histoire ».

 

Mais l’idée lui tourne dans la tête. Il n’a toujours pas lu le roman quand, dès le lendemain de sa lettre réticente à Katherine Brown, il se met à lui envoyer des courriers en rafale qui montrent qu’il ne cesse d’y penser. Il mentionne immédiatement (48 heures après) le nom de Clark Gable pour Rhett Butler.

 

(...)

 

George (Cukor) déclara qu’il ne travaillerait que si l’on revenait au script original de Howard. David prit la chose très mal et répliqua que c’était lui le producteur, qui savait ce qu’était un bon script. Sur quoi George dit qu’il était réalisateur, et même très bon réalisateur, et qu’il ne signerait pas un mauvais film…Plutôt s’en aller ! David lui répondit qu’il pouvait partir…

 

(...)

 

Suivant la coutume des studios, Selznick souhaite effectuer une projection test du film avant de le considérer comme terminé. Son monteur Hal Kern est chargé de l’organiser dans un lieu secret, inconnu même du producteur qui ne vit plus que pour terminer son film. Il faut éviter les indiscrétions que DOS risquerait de susciter lui-même en parlant trop ! Le 9 septembre, David Selznick, Irène, sa femme et Jock Whitney prennent la route avec Hal Kern pour une destination inconnue. Un film à succès de William Wellman avec Gary Cooper, « Beau Geste », est à l’affiche du Fox Theatre dans la petite ville de Riverside. On propose aux spectateurs de rester pour assister à la projection test d’un film surprise. A l’issu de la séance, ils seront invités à remplir un questionnaire et à « juger sans critiquer ni faire de déclaration publique par la suite ». Ils sont priés de téléphoner chez eux pour prévenir car personne ne pourra ni entrer ni sortir de la salle pendant la projection. Enfin le film démarre devant une salle comble très intriguée. Max Steiner n’a pas encore livré la musique. C’est celle d’un autre film produit par Selznick qui est présentée.

Le générique déclenche des réactions fortes. Le nom de Margaret Mitchell est applaudi avec enthousiasme, le titre du film provoque un début d’émeute. On ne s’entend plus. Le projectionniste a poussé le son au maximum. Selznick, sa femme et son associé pleurent comme des enfants. Peu à peu le silence se fait. Il dure jusqu’à la fin du film…et au-delà. Après la dernière scène, après le générique de fin, les spectateurs restent immobiles, comme pétrifiés, un moment qui semble une éternité, avant d’éclater en applaudissements frénétiques.

Le film ne sera plus modifié. Les spectateurs, unanimes, demandent de ne pas le raccourcir malgré sa longueur. Leurs commentaires sont dithyrambiques.

 

(...)

 

Selznick va ainsi parvenir à bloquer Hitchcock sans contrat pendant plus d’un an de discussions molles, en se montrant sous un jour plus manipulateur qu’il n’apparaît au cours de la production d’« Autant en emporte le vent ». Son désir de travailler avec le cinéaste britannique est pourtant authentique, et il va tout de même laisser paraître par moment son enthousiasme pour son talent. Mais il le maintiendra dans une incertitude perturbante tout en faisant trainer d’interminables négociations et en empêchant d’autres producteurs de conclure avec l’artiste. Il est vrai que l’intention même de DOS de lancer ce nouveau projet complexe à mettre en œuvre alors qu’il est mobilisé par le film le plus ambitieux de son époque, « Autant en emporte le vent », prouve à elle seule sa détermination.

 

(...)

 

Face à lui un Hitchcock vulnérable financièrement prend peu à peu conscience des intrigues autour de lui. Il reste cependant décidé à travailler avec DOS, sans perdre le style de ses films et sa touche personnelle à l’humour anglais prononcé, que son producteur américain ne comprendra jamais.

On peut dire que parfois Selznick va jusqu’à maltraiter Hitchcock, mais il réussira tout de même à l’attirer à lui et à le garder sous contrat, en s’appuyant sur tous les arguments possibles, pendant près de neuf ans, entre 1938 et 1947 une durée plus longue que celle des contrats qui enchainaient les stars aux studios.

 

(...)

 

Hitch quant à lui, s’il lui arrivait de se fâcher, ne perdait jamais son sens de l’humour. Ses échanges avec DOS le montrent, tel ce télégramme envoyé par le réalisateur le 11 mai 1940 pendant qu’il travaillait avec Walter Wanger sur « Correspondant étranger ». Il espérait entreprendre un autre film « Mr and Mrs Smith », une fois de plus « prêté »par la société de DOS avec qui il était toujours sous contrat, mais qui ne lui proposait rien:

« A David Selznick.

 Cher David, je comprends de ce que me dit le bureau de Myron qu’un refus a été opposé à ma demande d’autorisation de faire tout de suite un film par moi-même et de prolonger mon contrat avec vous en conséquence-STOP- Je n’aurais jamais fait cette demande si je n’avais pas eu à dépenser tant d’argent à m’établir matériellement et si je n’avais pas été empêché de faire venir un peu de mon argent d’Angleterre en raison des restrictions de guerre - STOP- Ce sont les raisons pour lesquelles je suis soucieux d’augmenter ma surface financière ici dans le futur immédiat et un film à ma valeur actuelle sur le marché me suffirait - STOP- S’il vous plait David, si vous avez le plus petit soupçon d’amour pour moi, répondez à ce cri plaintif de votre serviteur dévoué qui a perdu beaucoup de poids pour cause d’anxiété doublée d’un régime. Hitch.

Alfred Hitchcock »

 

(...)

 

L’arrivée d’Ingrid Bergman « sur le marché » américain suscita d’ailleurs un vif mouvement de jalousie et même de protectionnisme parmi les actrices qui peinaient à atteindre le haut de l’affiche. Irène Selznick raconte qu’elle l’emmena le soir même de son arrivée à une soirée au « Beachcomber », un club à la mode, où Joan Bennett déclara à haute voix devant elle: « On a assez de mal comme cela à trouver du travail. Faut-il vraiment importer des filles de cuisine ? »

       

Selznick, la rencontra pour la première fois un soir de 1939, tard, après une longue journée de tournage d’ « Autant en emporte le vent ». Dès la première minute qu’ils passèrent ensemble, il se conduisit comme il l’avait toujours fait avec les comédiennes : selon la méthode des studios, pour être sûr de l’imposer au public, il voulut suivre son instinct et la transformer à son idée…

Déjà consterné par sa grande taille qu’il découvrait sans pouvoir y remédier, il afficha également son scepticisme sur son nom à la consonance germanique. Il manifesta son souhait immédiat de le changer pour le rendre plus américain (d’autant plus qu’ils étaient à la veille de la guerre). De plus, il voulut lui imposer le maquillage à la mode de l’époque, façon Greta Garbo, alors qu’elle arborait un teint de lys et de rose parfaitement naturel. Bien sûr il y avait aussi sa ligne de sourcils à corriger un peu, et ses dents à limer… « Rendez-vous au département maquillage demain matin ! » lui déclara-t-il sans ambages.

 

Ingrid s’insurgea avec véhémence et répondit du tac au tac qu’elle allait rentrer chez elle tout de suite si on la touchait. De plus, elle préférait lui dire tout de suite qu’elle refusait absolument de faire la moindre interview et la moindre photo de publicité avant de tourner. Selznick était interloqué. Tous deux se regardaient fixement à travers la table de la cuisine où DOS, affamé à cette heure tardive, avait cessé d’enfourner son diner à grosses bouchées. Après un long silence, il accepta contre toute attente l’ensemble des exigences de la jeune actrice. Le lendemain matin, il les imposait avec de grands cris convaincus à son équipe réprobatrice, épousant dans le détail le moindre des souhaits de l’actrice et reprenant tous ses arguments à son compte devant ses collaborateurs interdits…

 

Un changement révolutionnaire s’amorçait à cette minute. Bergman triomphant bientôt sur les écrans, l’ère des stars somptueuses mais stéréotypées de Hollywood allait peu à peu toucher à sa fin. Le naturel entrait sur les plateaux.

 

(...)

 

L’homme qui a permis à un film tel qu’« Autant en emporte le vent » d’exister mérite de représenter aux yeux du public « le producteur » par excellence. En voyant le film, on imagine immédiatement un tournage plein d’aventures, comme celui de « Laurence d’Arabie » et de ces épopées grandioses à l’ancienne impossibles à réaliser à notre époque sans utiliser le numérique. Les enfants d’aujourd’hui continuent de découvrir avec émerveillement ce monument mythique du septième art, souvent sur les écrans plats modernes de leur domicile. Quant aux cinéphiles, ils sont nombreux à se souvenir du nom de David O.Selznick malgré le fait que les producteurs sont d’habitude vite oubliés, si tant est qu’ils soient un jour connus.

 

Car Selznick et ses mémos obsessionnels ont donné une image vivante du métier de producteur. Bien sûr une personnalité si affirmée a engendré critiques et réticences : « La vision des films de producteurs de prestige comme Samuel Goldwyn, Irving Thalberg et David O. Selznick, dans son ensemble, renforce l’impression de conformisme que nous avions alors» note ainsi Bertrand Tavernier à propos du cinéma américain de l’époque.

 

(...)

 

Quel portrait de David O. Selznick garde-t-on en fin de compte ?

En quoi les qualités et les défauts dont il fait preuve nous apportent-ils une compréhension de son métier ?

 

(...)

 

Il a le goût de l’aventure et du risque. Il aime le jeu et le fait de « relever le gant », de ne pas laisser la place à d’autres… surtout quand il estime que cette place lui est due par son statut et ses compétences. Il est d’une nature fière. Il ne s’avoue jamais battu, même au milieu des situations qui paraitraient inextricables à d’autres. Il ne montre pas ses doutes sauf pour en tirer avantage ou se sortir d’une situation qu’il juge périlleuse ou négative.

 

Autre qualité fondamentale dans ce métier, Selznick a le sens de l’argent. Il a l’art de savoir à quel moment l’utiliser à bon escient, parfois à flots, sans pour autant le dilapider. Il sait optimiser la dépense et la qualité recherchée. Mais il ne lésine jamais sur la dépense quand il la croit utile, quitte à mettre en danger ses finances personnelles.

Ce sens de l’argent se fait parfois au dépend des relations humaines, comme on l’a vu à propos de Hitchcock ou d’Alexandre Korda.

Cependant, comme pour la plupart des hommes animés par une passion, la richesse n’est pas une fin en soi pour lui. Il cherche le succès du film, qui lui apporte l’aisance au passage. Il réinvestit la plupart de ses gains dans des projets. IL connaît des fortunes diverses. Il n’a ainsi jamais acquis de grande fortune, à la différence de Lew Wasserman.

 

Mais pour devenir ce personnage qui nous passionne, accomplir ces tâches épuisantes et stressantes, mener ces travaux sans fin, Selznick a payé un lourd tribut. Pris dans le tourbillon de ses projets, il s’est mis à absorber plus que de raison de la benzédrine, une amphétamine de la première génération qui lui permettait d’enchainer des nuits blanches après des jours de folie qui seuls auraient déjà épuisé un individu résistant. Sa santé de fer l’empêchait de sentir le risque.

En permanence au bord de la rupture de ses forces, il s’usa sans s’en rendre compte, jusqu’à connaître des périodes de dépression qui provoquèrent des dissonances dans sa carrière à la fin de sa « décennie magique » 1930-40. DOS n’était pas un surhomme, juste un producteur extraordinaire au sens propre. Il se consuma avec passion pour les films.

 

 

Lew Wasserman

 

(…) Pendant près de six décennies de règne sur MCA, Lew Wasserman ne va rien moins que changer le système, bousculer les règles des métiers du cinéma, inverser les rapports de force des artistes face aux studios, imaginer des contrats novateurs, faire et défaire des carrières, devenir producteur et découvreur de talents. Il représente le Pouvoir à l’état pur dans une industrie en mutation qui devient la deuxième source de revenus de l’exportation des Etats Unis….et, à partir des années 60, c’est dans la vie politique américaine elle-même que son influence va s’étendre.

Durant toute sa longue carrière, il va éviter de s’exposer et fuir la presse, adoptant une attitude illustrée par la phrase clef qu’il devait répéter sans se lasser à ses collaborateurs : « la publicité est pour les clients, pas pour nous. » C’est pourquoi son nom n’est pas aussi connu que ceux de Sam Goldwyn, Louis B. Meyer, Jack Warner, les prestigieux moguls qui dirigent les studios à la même époque ; cependant c’est sur l’industrie toute entière que la puissance de Wasserman va s’exercer. Il sera sans contestation le dernier des légendaires nababs du cinéma, le « titan » le plus puissant d’Hollywood pendant les cinquante ans qui suivirent la fin de la seconde guerre mondiale.

 

(...)

 

Avec la guerre commença l’aventure étonnante de « La Cantine d’Hollywood », une autre étape dans la carrière de Lew Wasserman. La légende veut que John Garfield et Bette Davis en soient à l’origine. John Garfield enrageait de ne pas pouvoir s’engager pour des raisons de santé, et Bette Davis trouvait amusante l’idée de danser aux bras de valeureux GI’s en permission. Ils s’adressèrent à Jules Stein, qui accepta leur projet d’organiser des soirées de détente pour les soldats avec toutes les stars d’Hollywood. Il comprit immédiatement l’avantage qu’allait en tirer MCA en terme d’image et peut-être au-delà….et il finança donc cette « Cantine ». Sa femme Doris prit même la tête du comité d’organisation et des hôtesses qui accueillaient les militaires.

Un règlement strict précisait que l’alcool était interdit et que les soldats n’étaient pas autorisés à voir les stars en dehors de la Cantine. Les soldats de couleur, Noirs, Philippins ou Latinos n’étaient pas admis, au prétexte que leur présence risquait de provoquer des rixes ! Ils pouvaient se faire tuer au front, mais n’avaient pas droit au repos du guerrier. Mais à cette époque de ségrégation, cela ne choquait personne. Les quelques acteurs noirs de Hollywood étaient rares, et il fallut attendre 1967 pour que Sidney Poitier puisse être à l’écran le héros d’une histoire d’amour inter raciale dans « Devine qui vient diner ce soir ?», (1)

 dont le sujet provoqua une grande émotion aux Etats Unis. Mais à la Cantine, tous les soirs sauf le dimanche, jusqu’à 2000 personnes dansaient au son des meilleurs orchestres dans la salle aménagée en saloon traditionnel, après que 300 volontaires aient vérifié leurs identités…

La communication était surveillée comme le lait sur le feu, de sorte que, s’il y eut d’inévitables dérapages dans la chaleur de l’ambiance, la presse en donna toujours une version édifiante. Lew Wasserman veillait au grain sans se montrer, y compris en ce qui concernait sa vie personnelle et familiale dont il se mit surveiller l’image avec attention.

 

(...)

 

En 1957, Lew vit qu’il serait sage d’écarter Milton Green de la société de production de Marilyn, pour le remplacer par Arthur Miller. En effet, l’auteur, jaloux et ombrageux, dénigrait chaque idée du photographe et réclamait le contrôle de la société de production de sa femme. Green n’avait pas démérité, loin de là. Son bilan était positif pour Marilyn. Mais sa présence devenait difficile à gérer. Il se retrouva « seul dans le froid » selon l’expression de l’agent Jay Kanter. Wasserman lui fit habilement savoir que le problème venait des exigences de Miller, pour qui le photographe et sa femme Anny n’avaient déjà pas de sympathie auparavant. « Arthur était un coup de barbe…un fils de pute…un voleur. J’ai vu qui il était la première fois que je l’ai rencontré….C’est à cause d’Arthur que Marilyn Monroe Production fut cassé. Il n’était pas seulement jaloux de Milton,, mais il était jaloux du temps qu’ils passaient ensemble. Arthur a dit : ‘C’est lui ou moi.’ »

 

(...)

 

Mais le patron de MCA n’avait rien à craindre de la Mafia que Jules Stein et lui-même avaient toujours ménagée dans l’intérêt des deux partis, depuis leur jeunesse l’un à Chicago et l’autre à Cleveland. Wasserman, comme Stein, avait tout au long de sa carrière laissé graviter dans son entourage des personnages que la rumeur qualifiait d’amis, voire de membres de la Mafia. Les affaires de Stein avaient commencé à prospérer pendant la prohibition, lorsqu’il louait ses premiers orchestres tandis qu’il continait avec passion ses activités de médecin en parallèle. Quant à Lew, il avait connu sa première expérience avec la Mafia tout jeune, au Mayfair Casino de Cleveland où il travaillait sous la direction du « Silent Syndicate » juif de Moe Dalitz avant de rejoindre MCA.

Mais quelle Mafia fréquentait Hollywood ?

 Les organisations du crime installées à Los Angeles depuis le début du XXe siècles étaient originaires de Sicile. Le développement de Las Vegas attira vers l’Ouest différentes familles comme les Dragna qui régnèrent plusieurs décennies dans toute la région, affrontant divers conflits sanglants avec des bandes rivales. Des noms devenus mythiques comme Lucky Luciano, Benjamin « Bugsy » Siegel ou Mickey Cohen se croisèrent dans les épopées des gangs californiens jusqu’aux début des années 1950.

Le département de police du Shérif du Comté de Los Angeles County était corrompu. Le maire lui-même, Frank L. Shaw, membre du Los Angeles City Council et du comité de surveillance de la ville, fut démis de ses fonctions en 1938, une première dans l’histoire de la Californie. Son administration était infiltrée. Il laissait faire, il aidait peut-être même. Rien ne fut prouvé directement contre lui, mais il se retira de la vie politique précipitamment.

En même temps, Earl Warren, l’« Attorney General », ministre de la justice de l’état de Californie, lança l’assaut contre l’empire de Dragna, et le département d’élite de la police de la Ville (L.A.P.D., le « Los Angeles Police Department »), qui était moins corrompu que les équipes du shérif, créa en 1946 une équipe de policiers spéciale pour harasser les gangs les plus violents et les éliminer. « A partir de 1950, sous les ordres de William H.Parker, ces hommes réunis dans un groupe officieux de forces de l’ordre appelé ‘The Gangster Squad’ (‘l’escouade des gangsters’) se mirent à sévir efficacement contre la Mafia. Leur approche était ‘la fin justifie les moyens’. Armés jusqu’aux dents, autorisés à tirer en toutes circonstances, leur mission était de nettoyer à tout prix la ville de la Mafia venue de la côte Est. Ils rendaient leur justice en toute liberté bien loin des tribunaux ! »

Cette guerre à armes égales, utilisant les méthodes illégales et violentes habituellement propres à la Mafia, donna dans un premier temps aux familles l’impression que des gangs rivaux d’autres régions voulaient s’introduire sur leur territoire. Les chefs de familles ne comprenaient pas qui les attaquait ainsi. Ils étaient déstabilisés. Par la suite, l’efficacité des moyens de la Police, le renseignement, l’organisation, combinés avec la méthode forte finirent par décimer les familles qui, affaiblies, se regroupèrent plus au Sud dans la région de San Diego. La ville de Los Angeles était nettoyée de la Mafia sicilienne.

« The Gangster Squad » est devenue une légende maintes fois racontée au cinéma. Les deux dernières versions, une série documentaire pour Warner Brothers et un film de Rubin Fleisher, interprété par Sean Penn qui connaît un grand succès, datent de 2013 !!

 

(...)

 

Par ailleurs, il avait l’habitude de se mettre à la disposition de ses clients et d’accepter leurs fantaisies les plus folles quand ils avaient du talent. Mais Sinatra fut sa grande exception : son caractère indisposait absolument Lew. Il explosa plusieurs fois contre le chanteur, le menaça de l’exclure de l’agence. Sinatra lui répliquait avec insolence : « On ne renvoie pas la poule aux œufs d’or ».

C’était vrai en général. Mais en fin de compte, Lew le renvoya aussi brutalement que s’il avait été un vieil artiste sur la pente descendante. A la suite d’un clash financier, Wasserman annonça directement à Variety et au Hollywood Reporter que Sinatra ne faisait plus partie de MCA. Il n’avait pas prévenu le chanteur.

Sinatra ne pardonna jamais à Wasserman tandis que Lew affichait par la suite une indifférence hautaine à ce qui arrivait à son ancien client, à son habitude sans jamais faire le moindre commentaire.

Il avait cependant enseigné au passage à Sinatra la leçon que son propre exemple de travail montrait à ses stars. « L’ancienne idole des teenagers en chaussettes blanches en avait tiré sa propre interprétation :’les gens me disent souvent que j’ai de la chance’ dit-il un jour au journaliste du New York Time Tom Pryor, ‘mais je pense que la chance n’a rien à voir là-dedans. Il faut quelque chose de plus substantiel. La compétition est trop féroce.’ »

 

(...)

 

Mais un grain de sable se glissa dans la stratégie bien huilée de MCA. Lew et Marilyn Monroe avaient maintenant de mauvaises relations. « Même quarante ans plus tard, beaucoup des témoins de la guerre entre MCA et la Ministère de la Justice insistent encore sur le fait qu’une vengeance politique et une femme magnifique détruisirent l’agence artistique que Jules Stein et Lew Wasserman avaient bâtie. Si Lew n’avait pas traité Marilyn de façon mesquine et si Bobby Kennedy n’avait pas été tellement séduit par Marilyn, MCA aurait continué à dominer Hollywood jusqu’à aujourd’hui. Dans ses mémoires, en 1955, Shirley MacLaine maintient elle aussi que…(…)…Marilyn alla se plaindre de Lew auprès de Bob Kennedy. (...)

 

Son amitié avec Marilyn, son projet de film « The Ennemy Within » sur la Mafia et Hollywood bloqué, son obsession sincère de la justice, c’est donc un faisceau de raisons convergentes qui décida Bob Kennedy, à la surprise générale, à autoriser Posner à organiser le Grand Jury contre MCA.

Lew Wasserman de son côté, absorbé à Los Angeles par la réussite de son entreprise titanesque, n’avait jamais réellement entrepris de relations avec le pouvoir politique. Il n’avait pas de correspondant à Washington pour présenter son dossier de façon favorable. Son ami Ronald Reagan était à cette époque encore acteur et membre peu actif du parti démocrate, sans influence nationale. Il allait se tourner vers le parti républicain en 1962, et c’est en 1964 qu’il fut élu gouverneur de Californie.

Lew se trouvait sans appui politique face à Robert Kennedy. Mais tout Hollywood semblait derrière lui.

 

(…)

 

Hitchcock écoutait Lew, l’appréciait, passait des week-ends chez lui à Palm Springs, l’invitait chez lui, déjeunait avec lui au Studio…mais ne se départissait jamais de son humour. Il offrit à Wasserman, l’homme toujours vêtu de noir, un tableau qui trônait dans la luxueuse maison de Northfoot Hill Drive de l’agent, au milieu des peintures de Vuilliard, Degas et Soutine. C’était un portrait hyper réaliste de Lew, à l’allure sévère. Un collaborateur de MCA dans les années 60 raconte : « Lew, sur ce tableau, ressemblait à une personnification absolument sinistre du mal. Je demandais un jour à Hitchcock :’Mais il n’a pas compris le message ? ’ Et il plissa les yeux comme s’il ne voyait pas bien ce que je voulais dire. Mais je suis sûr qu’il avait compris

En fait, Hitch adorait taquiner Wasserman, qui raconta quelques années avant de mourir, quand il s’autorisa à de rares confidences : « Hitchcock, dit-il, était un génie et aussi un plaisantin permanent. Un soir, nous étions chez Chasen’s, et quand le serveur m’a apporté mon verre de vodka, il était bleu. J’ai dit :’ c’est le verre de quelqu’un d’autre’. Puis on s’est assis pour diner, et tout était bleu. Les pommes de terre étaient bleues ! Hitch a déclaré : ‘ je suis d’humeur bleue’. »

 

(…)

 

En juillet 1952, Wasserman disposait d’un atout gagnant pour obtenir la signature de cet accord improbable : Ronald Reagan, doué pour la communication autant que pour ses prestations équestres pour les écrans, était son client et son obligé en même temps que son ami. Lew était fasciné par les personnages talentueux. Reagan en était un. (… )

Membre, puis vice-président du Syndicat des Acteurs, Reagan s’en était fait élire président en 1947, encouragé dans cette voie par son agent et ami Lew.

Sa présence à la tête du Syndicat joua évidemment un rôle dans la faveur que le syndicat allait donner à MCA. L’homme avait été comblé par le célèbre contrat d’un million de dollars négocié par Lew. Par cet accord-cadre dérogatoire négocié entre deux amis, la SAG donnait à Wasserman carte blanche pour produire des films de cinéma mais aussi pour prendre position sur le marché de la télévision en produisant des téléfilms dont les droits allaient créer un catalogue sans concurrence pour des années, prêt à alimenter les nouvelles chaines affamées de programmes.

 

Sans plus attendre, Wasserman créa Revue Studios, une société de production émanation de MCA dont il prit la direction lui-même.

 

Les autres producteurs et les studios ne croyaient pas à un tel besoin de fictions pour la télévision, un média un peu méprisé par les créateurs de « grands films ». Wasserman avait au contraire tout de suite vu l’avenir de ce média dévoreur d’images et la fortune qui s’y cachait. Les studios, restés aveugles à cette mutation, devaient vaciller de plus en plus à la suite de cette erreur fatidique.

 

Reagan, lui aussi, avait très tôt cru en la télévision. Il fut un des premiers acteurs à tourner dans une série, dès la fin des années 40. De plus, il était ravi de rendre service à Lew à qui il devait tant.

 

(…)

 

Dès 1963, Lew Wasserman, riche et puissant, premier producteur dont le nom n’apparaissait pas au générique, avait changé tout le système de Hollywood.

Mais « La confrontation avec les Kennedy avait donné à Lew une leçon importante : elle lui avait appris que le vrai succès sur une large échelle a beaucoup à voir avec les protections politiques.L’important n’était pas le parti choisi. L’important était de se tenir au courant des projets de lois, de contribuer à financer les deux partis, et d’exiger en retour des avantages fiscaux et législatifs pour MCA en particulier et pour l’industrie en général. »

 

 Marqué à vie par l’attaque dont il avait été l’objet, il choisit donc de devenir un généreux donateur politique tout en développant de plus belle les affaires de MCA, qui devenait un empire.

 

(...)

 

Dès l’année 1963, Lew Wasserman, protégé par ses amitiés, désormais chez lui à Washington, au sommet du pouvoir à Hollywood, paraissait donc invulnérable.

Richissime, tout ce qu’il touchait semblait se transformer en or, des droits des films qu’il exploitait aux activités annexes qu’il imaginait, tels le parc d’attraction d’Universal Studios, la valorisation des terrains immobiliers d’Universal, ou même la création d’une société financière à Chicago. Il avait été jusqu’à fonder une société de cars pour promener les touristes qui effectuaient le tour d’Universal City. La ligne s’arrêtait au restaurant du studio pour le déjeuner, permettant ainsi à MCA de rentabiliser les cuisines, tandis que le personnel mangeait au snack, plus rapide, pour ne pas perdre de temps de travail… La société de bus ouvrit même pendant quelques mois une filiale à Washington sur la suggestion du Président Johnson, pour montrer aux touristes la Maison Blanche, le Congrès et autres monuments de la Capitale.

Lew avait fait fortune !

Pourtant, la rose ne tarda pas montrer ses épines.

 

Gérard Lebovici 

 

Qui peut résister à Gérard Lebovici ?

 

1980- Quinze ans se sont déjà écoulés depuis que David O’Selznick est mort prématurément, victime d’un infarctus. 

Lew Wasserman, 67 ans, connait un âge d’or à la tête d’Universal. L’idée de prendre sa retraite n’est pas près de l’effleurer! Il n’envisagera la vente de son empire que dix ans plus tard, et restera au centre de la table de jeu jusqu’à l’âge de 82 ans, en1995. Le temps aura été l’ami de cet homme là.

En France, l’agence artistique ArtMedia est au zénith. De Jeanne Moreau à Romy Schneider, de Gérard Depardieu à Costa Gavras, d’Alain Corneau à Jean Loup Dabadie, la liste des stars, acteurs, réalisateurs et scénaristes qu’elle représente est impressionnante. Ses réseaux avec les impresarios (ou impresarii…) d’autres pays comme l’Italie en font de plus la première agence européenne.

Gérard Lebovici, son fondateur, a 48 ans.

 

(…)

 

En 1980, en France, le nom d’ArtMedia  n’est pas connu non plus en dehors du métier.

Les spectateurs et les lecteurs de magazines se passionnent pour les acteurs. Les cinéphiles s’intéressent à leurs réalisateurs préférés. Mais qui retient le nom des producteurs ?  Quant aux agents, qui ne figurent ni sur les génériques ni sur les affiches, on n’imagine tout simplement pas leur importance.

Cette discrétion convient à Gérard Lebovici, qui la recherche. Il souhaite l’efficacité dans l’ombre. Il sera livré aux débordements des médias quatre ans plus tard, en raison de son assassinat. A cette occasion, les journalistes découvriront son visage sur quelques photos glanées ici ou là. Mais à l’époque, seuls ses intimes savent que sa vie a commencé par une autre tragédie. Et seuls les initiés aux arcanes complexes du métier savent qu’il a modernisé les règles du jeu du cinéma français et qu’il a, comme Lew Wasserman, fait basculer le pouvoir en faveur des créatifs français.

 

(...)

 

Méfiant et discret jusqu’à l’obsession, Lebovici portait depuis son enfance la blessure inguérissable de la disparition de sa mère, Marie, arrêtée à Paris pendant l’occupation par des miliciens venus la chercher à son domicile sous les yeux de ses enfants, Gérard et sa petite sœur Nicole. Marie Lebovici ne devait jamais revenir.

Gérard Lebovici avait une dizaine d’année au moment du drame. Son père, caché chez les voisins du dessous lors de la rafle, ne se remit pas de son chagrin et disparut quelques années après la fin de la guerre. Adolescent, Lebovici se retrouvait orphelin avec charge d’âme. Contrairement à l’apparente sûreté de lui-même qu’il affichait, à son charisme, sa gaîté et sa curiosité insatiable, il conserva de cette tragédie la conviction qu’il n’avait pas de chance dans la vie et attendait toujours une catastrophe….tout gardant au fond de lui une inépuisable réserve d’énergie pour la combattre et se relever.

C’est sans doute cette douleur secrète et cette inquiétude qui le rendaient attentif aux plus faibles, dans sa famille puis autour de lui tout le long de sa carrière. (...)

 

(…)

 

Jorge Semprun, qui écrit pour Alain Resnais le scénario du film « La guerre est finie », a rencontré Gérard Lebovici chez Montand et Signoret. Il préside aux premiers pas de Champ Libre. « …Je lui ai fait découvrir Georges Orwell…Il n’était pas très cultivé, mais il avait un flair inouï… »

Gérard Guégan et Alain le Saux, rejoints plus tard par Raphaël Sorin, participent activement aux premières années.

Amoureux des livres, Gérard et Floriana Lebovici, ce couple d’esthètes, ont choisi une maquette originale au format assez étroit, devenue « classique ». Le papier est épais. Les couvertures élégantes ont été étudiées avec un ancien maquettiste du très raffiné éditeur milanais Adelphi, avec qui Floraian avait travaillé dans le passé. Les livres de Champ Libre se remarquent tant par leurs sujets que par leur aspect.

 

(...)

 

Dès le début, Gérard s’intéresse à tous les genres du 7e art. La Nouvelle Vague, le cinéma populaire…En 1970, cet assoiffé de culture créera une maison d’édition élitiste et provocatrice, Champ Libre, et certains le verront comme un gauchiste méprisant les films populaires qui font vivre son agence. Cette réputation grandit lorsqu’il affichera ses liens avec Guy Debord, le réalisateur situationniste. Elle lui restera par la suite : Ainsi Jean-Luc Douin écrit en 2004 dans sa biographie très documentée sur Gérard Lebovici : «… ( dans les années 60) Lebovici, qui n’a toujours pas rencontré Debord, orchestre tout un système produisant des films qui, dans leur majorité, ne correspondent pas à ses idéaux artistiques et révolutionnaires ».

 

Pourtant Douin se trompe sur ce point. En fait Lebovici a toujours trouvé un réel plaisir dans la diversité des talents qui l’entouraient et bientôt se mirent à le rechercher. Il est heureux d’être l’agent et l’ami de Belmondo, non seulement quand il joue pour Godard ou Melville mais à l’époque de ses films d’action, passant parfois même des vacances avec lui ; aussi bien soutient-il Alain Resnais en toutes circonstances. Il est passionné par les acteurs, les scénaristes, les réalisateurs, dès qu’il les admire. Au fil du temps, Il ne s’occupe d’ailleurs personnellement plus que de ceux-là.

 

Mais si Lebovici ne craignait pas les propos provocants, il respectait et admirait ses clients talentueux et garda toujours une profonde amitié pour certains d’entre eux ainsi que pour ses associés, Serge Rousseau, Jean-Louis Livi et bien sûr Michèle Méritz.

 

(…)

 

C’est alors qu’un producteur vieillissant, Pierrre Braunberger, Président de la Chambre Syndicale des Producteurs, déposa plainte contre Lebovici. Il  entraîna derrière lui une partie des professionnels frustrés devant le pouvoir de l’Agence.

La plainte  accusait Lebovici d’enfreindre le droit du travail en produisant des films indirectement  depuis son bureau de l’agence artistique ArtMedia, agissant ainsi en infraction avec son activité d’impresario. 

Braunberger avait accompagné avec talent la Nouvelle Vague et connaissait Lebovici depuis ses débuts. Il avait reçu un César d’honneur en 1980 pour l’ensemble de sa carrière. Son revirement aigre choqua plus d’un de ceux qui avaient partagé cette époque difficile et excitante. La plupart de ses  anciens amis étaient ulcérés. Serge Rousseau disait encore des années plus tard : « Je ne pardonnerai jamais à Braunberger ».

 

Certains disent cependant que Braunberger n’en voulait pas personnellement à Lebovici, mais qu’il était passé à l’action seulement pour protéger le métier de producteur d’une prise de pouvoir des agents à la façon de Lew Wasserman aux Etats Unis. Il n’aurait pas craint les dérives de Gérard Lebovici , qu’il pensait trop talentueux pour abimer la profession. Mais il aurait craint la contagion plus tard, venue d’agents moins scrupuleux que lui . (…)

 

Quoiqu’il en soit, malgré de nombreux soutiens et témoignages des plus grandes sociétés de la place, Gérard Lebovici fut contraint d’abandonner l’agence qu’il avait crée.

 

(…)

 

 

L’ouverture du Studio Cujas, consacré aux œuvres cinématographiques de Debord, eut lieu le 23 octobre 1983. Quelques mois plus tard, le soir du 5 mars 1984, Gérard Lebovici était assassiné, laissant dans le désarroi les nombreux artistes qu’il soutenait.

 

Au premier rang de ceux-ci, Alain Resnais était en train de réaliser « l’Amour à Mort », film que, malgré son talent reconnu depuis des années, il  n’aurait pas pu monter sans l’audace et l’admiration  de son producteur:  « A son retour des Etats-Unis (après l’échec de ‘Je t’aime je t’aime’ en 1968), Gérard Lebovici prend son destin en mains : ‘ Il avait décidé que, même à perte, certains cinéastes, dont j’étais, devaient pouvoir coûte que coûte tourner des films : Qu’il fallait leur assurer une existence !’ Pendant quatre ans, Lebovici lui donne des coups de main financiers, une sorte de salaire qu’il justifie par des travaux prétextes….(…)….Resnais est formel : ‘ Sans Gérard Lebovici, ma carrière professionnelle se serait arrêtée en 1969. (le  film) Stavisky a été un tournant pour moi. Après, il a toujours décidé de tout pour moi. Tout en respectant mes désirs.’ » (1)

 

Debord n’aimait pas Resnais, et en général, à part le réalisateur gitan Tony Gatliff, il rejeta tous les artistes que Gérard avait soutenus. Jalousie ? Peut-être.  Avec l’accord de Philippe Dussart, Resnais choisit de mettre Gérard Lebovici en première ligne sur la publicité de son film « l’Amour à Mort » en hommage posthume à son producteur.  « ….on n’allait pas le renier sous prétexte qu’il était mort ! C’est la seule fois qu’on a inscrit : Gérard Lebovici présente. On a même décidé de lui dédier le film… » (1)

 

Lebovici n’aurait peut-être pas accepté. C’est même vraisemblable. Il ne s’exposait pas.  Le seul film auquel il eut jamais décidé d’associer son nom, sur le générique et les affiches,  était « In Girum… » Mais Debord, furieux, devait réagir à cette initiative  sur un ton  courroucé et passionnel, traitant Resnais d’ « indélicat » et ajoutant : « Prétendre faire présenter un film par un mort, c’est la plus grande originalité du cinéaste Resnais depuis ‘Hiroshima mon amour’. » (1)

 

Cependant, une période sombre commençait pour les proches de Gérard Lebovici, faite de chagrin et d’inquiétude. De gêne aussi chez certains d’entre eux, car curieusement, la victime est souvent assimilée au coupable, tous deux liés dans les images banalisées et choquantes  dont une presse avide de sensationnel distille les détails vrais ou faux. Et des amis d’hier, en nombre, se cachèrent et restèrent silencieux, mal à l’aise.

 

Qu’allaient-ils faire de son héritage ?

 

(…)

 

Debord, amoureux de la civilisation espagnole, lui fait découvrir le poète Jorge Menrique ; libertaire et buveur, il l’introduit au poète persan du XIe siècle, Omar Khayyan. « Les habits neufs du Président Mao », de Simon Leys, révèlent à une intelligentia parisienne stupéfaite une Révolution Culturelle chinoise moins idéale que la mode de l’époque ne la dépeint.

En 1973, à la demande de Debord, Gérard Lebovici accepte de produire un film adapté de « La société du spectacle ». Un directeur de production proche de François Truffaut, Marcel Berbert, assurera le titre de producteur pour le compte de la société de Gérard, Simar.

Mais, bien qu’auteur et réalisateur, Debord occupe dès leur rencontre une place à part dans les centres d’intérêt de Lebovici. Leurs liens commencés au sein de Champ Libre ne vont pas passer par ArtMedia. Au contraire, le rapprochement entre les deux hommes et leur estime réciproque, s’ils n’ont rien d’un secret, apparaissent comme un mystère aux relations et aux amis de Gérard dans le milieu du cinéma. Il n’en parle pas dans ce cercle. Il cloisonne ces deux mondes qui ne se comprendront jamais.

Le conseiller est devenu ami, et omniprésent au sein de Champ libre où pourtant il ne se rend pas physiquement. En 1974, une rupture fracassante intervient entre Lebovici et la première équipe de Champ Libre, Gérard Guégan et Raphaël Sorin, Jean-Yves Guiomar et Alain Le Saux. Ils ont finalement compris que le propriétaire de la maison d’édition avait ses propres idées sur la ligne éditoriale. Indisposés par les interventions de Lebovici et la présence de Debord, ils réclament tout le pouvoir. En réponse, Gérard les licencie. Mais, déçu et choqué, il est hospitalisé d’urgence et doit subir une grave opération.

 

Dans les années 75/ 80 du siècle dernier, les livres et les films de Debord n’avaient aucun succès public…le « grand public », d’ailleurs, ne le connaissait pas. La plupart des intellectuels formant « l’intelligentia parisienne » étaient quant à eux exaspérés par son personnage d’artiste et de penseur provocateur et misanthrope. La mode était de le critiquer et de le bouder, même si certains admiraient ses idées ou pouvaient aller jusqu’à être fascinés par lui. Cause ou effet ? Il déclarait aimer susciter le rejet, se situant à un niveau supérieur à autrui. Quelques exceptions trouvaient grâce à ses yeux. Mais il avait le mépris facile et regardait de haut les auteurs qui cherchaient à plaire, tout en faisant jouer son charme auprès des très rares personnes qu’il voulait séduire.

Cependant, Lebovici, sa santé rétablie, prend le destin de Champ libre en main avec Debord à ses côtés. Les années de liberté commencent tandis que s’épanouissent leurs relations.

Car Gérard Lebovici avait tout simplement de l’amitié pour Guy Debord. Il l’admirait et voulait exposer son talent. Il se plaisait en sa compagnie. Des goûts communs rapprochaient les deux hommes, qui avaient le même âge (Debord était né en 1931, Lebovici en 1932). Ils partageaient un amour nostalgique pour le Paris de leur jeunesse, où ils marchaient sans fin autrefois, et qui disparaissait peu à peu. La théorie qu’exposait Debord dans « La société du spectacle » en 1967, pillée et déformée par des hommes politiques et des journalistes quelques années plus tard, passionnait Gérard. Ils discutaient des heures. Ils visitèrent l’Andalousie ensemble, Lebovici fit des séjours à la campagne chez Debord qui descendit chez Lebovici lorsqu’il venait d’Arles où il habitait passer quelques jours à Paris. Intimes, ils se vouvoyèrent pourtant toujours, de même que Gérard Lebovici vouvoyait François Truffaut, le plus proche de ses amis artistes. Gérard et Guy aimaient tous deux cultiver le paradoxe et recherchaient parfois les conflits, qui les stimulaient. La provocation les amusait, et ils la pratiquaient sans se priver de rire et de boire du vin ensemble.

 

Naturellement brillant, Gérard Lebovici trouvait dans la personnalité de Guy Debord une profondeur et une stimulation intellectuelle qui lui avaient manqué. Comme Lebovici, Debord était un autodidacte curieux qui aimait jouer avec les idées. Ils poursuivaient ainsi un dialogue permanent qui leur plaisait infiniment. Les mêmes auteurs les enchantaient, les mêmes œuvres d’art, les mêmes lieux. Debord avait vécu de peu entre vingt et trente ans et s’était laissé entretenir par un entourage aisé. Il n’avait donc pas été obligé de « perdre son temps » à gagner de l’argent. Ayant passé sa jeunesse à réfléchir, lire et parler quand il ne marchait pas dans Paris entre librairies et bars, il avait de l’avance sur Gérard dans le domaine de la culture. Lebovici lui, fascinait Debord par sa rapidité et sa finesse. (…)

A l’opprobre que suscita peu à peu cette amitié qualifiée de mystérieuse, Gérard Lebovici opposait (…) un silence satisfait. Au fond l’idée du mystère l’amusait. (…)

Au fil du temps, la gêne grandissait dans le milieu du cinéma à propos de la petite maison d’édition et surtout de Debord. Personne ne comprenait comment un homme aussi intelligent que Lebovici pouvait occuper une position incontournable d’un côté et perdre son temps et son argent de l’autre. Gérard restait muet sur le sujet ; personne n’osait vraiment l’interroger. François Truffaut s’y risqua, manifestant sa réprobation avec franchise et même véhémence…mais il n’insista pas. Il se confia à Georges Kiejman : « Je m’ inquiète pour notre Orgon » (…)

 

(...)

 

La sortie commerciale d’ « in Girum Imus Nocte et Consumimur Igni… » fut un échec encore plus retentissant que ce à quoi Gérard Lebovici s’attendait. (…)

 Malgré son pouvoir, Lebovici ne pouvait pas imposer longtemps aux salles la programmation à perte de « In Girum… ». Facétieux et convaincu à la fois, il décida en 1983 d’acheter le studio Cujas au Quartier Latin exclusivement pour passer le film dont aucun exploitant ne voulait. L’idée était de projeter éternellement les oeuvres cinématographiques de Guy Debord.

Le film tournait en permanence devant les sièges vides, en respectant les horaires des séances. L’exploitation parvint-elle à la centaine de spectateurs au total de sa carrière ? Je ne suis pas sûre. Lebovici affichait sa joie et persistait.

 

 (...)

 

7 mars 1984. Le nom de Gérard Lebovici, inconnu du public jusqu’à ce jour, s’affiche dans les gros titres des journaux. Il a disparu depuis le 5 mars au soir ; son corps vient d’être trouvé à l’aube dans le parking Foch, à Paris, tué par quatre balles.

La proximité de Lebovici avec les stars les plus célèbres et sa personnalité réservée en font tout de suite un personnage de roman pour les journalistes. Le dernier livre publié par Champ Libre, préfacé de sa main, est une réédition de «L’Instinct de Mort » de Jacques Mesrine qui donne dans un premier temps du grain à moudre aux enquêteurs.

 

Mais en vain : Lebovici s’est certes rapproché de Sabrina, la fille de Mesrine et la soutient dans la vie. Mais le sujet de la vie de ce grand bandit est tout simplement populaire. Le livre avait déjà dans le passé suscité de l’intérêt pour une adaptation pour le cinéma par des vedettes du niveau de Jean-Paul Belmondo. Un malfrat connu tué sous les balles de la police ne peut que fasciner les artistes qui recherchent les caractères hors du commun pour attirer le public. En 2008, le projet verra finalement le jour, sous forme d’un film en deux parties, « Mesrine l’instinct de mort » et « Mesrine l’ennemi public n°1 » réalisé par Jean-François Richer. Il vaudra à Vincent Cassel dans le rôle titre et à son réalisateur le César 2009.

La piste Mesrine semble s’effondrer rapidement aux yeux des enquêteurs.

 

Cependant il faut noter que Gérard Lebovici s’était impliqué personnellement pour aider un distributeur d’Art et Essai, les Films Molière, à sortir en salles un mois avant sa mort, en février 1984, un documentaire, « Jacques Mesrine, ennemi public n°1 », réalisé par Hervé Palud, le compagnon de Sabrina Mesrine. Ce fait n’a rien de surprenant dans le contexte, entre son soutien pour Sabrina Mesrine et la parution de « L’instinct de Mort » aux éditions Champ libre. Mais Denis Chateau remarqua au moment de l’attribution des salles au film un fait tout à fait inhabituel de la part de Lebovici, toujours flegmatique dans les affaires. Le lundi précédant sa sortie, lors de la mise en place de la programmation, Denis crut ne pas pouvoir s’en tenir au nombre de salles prévu à l’origine pour le film (un incident classique pour des hommes habitués à ce dialogue du lundi matin). Il reçut alors de son ami un coup de téléphone l’implorant sur un ton proche de la panique « de ne pas faire cela ».

 

Après l’assassinat, tout de suite, c’est l’amitié de Lebovici avec un homme au passé « sulfureux » qui intrigue le plus la police comme la presse. Les médias à la suite du juge d’instruction font le rapprochement entre le drame et la personne de Guy Debord. Cet auteur mystérieux retient toute leur attention, tandis que les comédiens aux photos exposées en permanence dans les magazines ne semblent pas les intéresser.

L’image de Lebovici en restera marquée pour toujours.

 

(...)

 

Ce n’était que le début des ennuis financiers de Floriana.

 

Debord, extrêmement proche de Floriana pendant cette période, suivait toutes ses affaires du regard, même les affaires de cinéma auxquelles pourtant il ne connaissait rien. Peut-être cherchait-il  à l’influencer ; il était en tout cas à l’affût d’éventuels indices sur l’assassinat de son ami. Il connaissait le parcours de Denis Chateau, il savait quelle estime personnelle et professionnelle Gérard lui portait et il chercha plusieurs fois à le rencontrer, ce qui ne se fit pas.   Il ne se méfiait pas de lui « à priori ». C’était une exception. Ses critiques sur la quasi unanimité du milieu du cinéma étaient féroces. Il soupçonnait tout le monde du pire et, quand je le voyais,  me posait des questions sur chacun.

Il ne me parlait pas argent sinon d’une manière détachée, sans sembler y attacher d’importance, sur le ton dédaigneux dont il traita ces questions dans son œuvre, ou pour se demander si les succès fulgurants de AAA n’avaient pas entraîné la perte de Lebovici.

 

Pourtant, à  la différence de Lew Wasserman qui avait traversé des zones d’ombres en côtoyant des mafieux notoires, Gérard Lebovici, dans ses activités cinématographiques,  semblait jouer dans les règles. Certes le système de production français, bien qu’en principe contrôlée par les pouvoirs publics, permet aux plus malins de donner libre cours à leur imagination, de monter des réseaux avantageux et de jongler avec des comptabilités « créatives ». Mais les dérives restent limitées, sans comparaison avec les organisations du Crime outre atlantique.

 

Cependant Guy Debord pensait que quelqu’un de ce milieu pouvait avoir trouvé un profit à assassiner son ami.

Et le fait est qu’il avait été assassiné.

 

(...)

 

Le malheur voulut que Debord, dévasté par la mort de Lebovici et préoccupé de ses propres droits d’auteur, n’en acquit pas pour autant des qualités d’éditeur. Auteur, réalisateur, il avait été le conseiller de Gérard Lebovici. Artiste, il dépendait financièrement de sa maison d’édition, la Maison comme il l’écrit avec une majuscule quand il évoque Champ Libre dans sa correspondance pendant cette période. Lebovici avait entouré son ami d’égards particuliers et onéreux qui culminèrent avec l’achat du Studio Cujas pour sa seule gloire. Debord en avait pris l’habitude. Il n’avait aucune idée de la gestion et comptait sur la fortune supposée de Floriana pour continuer l’œuvre d’éditeur de Gérard.

 

(...)

 

 Aimée ou détestée, la citadelle ArtMedia voulue par Lebovici reste aujourd’hui incontournable. L’industrie s’est cependant durcie, et avec elle l’agence : disparue la gentillesse de Serge Rousseau, disparu le charisme et la gaîté de Gérard Lebovici. Disparu le temps où la production d’un film se montait dans une atmosphère ludique en dépit des difficultés récurrentes à toutes les époques du cinéma. Disparues les heures de détente sur les terrasses de Cannes, dans l’ambiance d’un Festival moins stressé qu’aujourd’hui, où le personnage le plus important du 7e art s’écriait dans un grand rire : « j’ai rien à faire » …

Mais le système Lebovici fonctionne, l’entreprise et le prestige demeurent.

 

Les années passent. Les ravages de la presse et l’opacité d’un assassinat non élucidé ont entaché l’image d’un homme, mais les rumeurs nuisibles disparaitront. Elles ne proviennent déjà plus que de rares journalistes en quête d’un éventuel scandale. Il faut espérer que Gérard Lebovici reprendra alors le statut qui était le sien lorsqu’il régnait sur le métier du cinéma.

En attendant, Resnais, Truffaut, Rappeneau, Costa Gavras, Corneau, tous les artistes qui avaient choisi Lebovici sont célébrés et étudiés. Leurs films sont autant d’hommages à leur agent, producteur, conseiller, éditeur, ami…

 

Guy Debord quant à lui avait pris le temps d’organiser la reconstruction de son personnage après le cyclone médiatique de l’année 1984, avant de se donner la mort le 30 novembre1994.

Contrairement à ses proclamations de jeunesse, l’auteur de La Société du Spectacle avait toujours été, au fond, désireux de la reconnaissance et de l’admiration de tous.

 

(...)

 

Une main qui reste inconnue a placé Gérard Lebovici sous les feux d’une actualité destructrice, lui qui aurait voulu connaître une réussite aussi discrète que celle de Lew Wasserman et ne recherchait la lumière que pour les artistes dont il admirait le talent. Un soir d’hiver, des années après les évènements tragiques de son adolescence, cette main a fait rentrer à nouveau le malheur dans son destin sans parvenir à l’effacer des mémoires.

Si un jour Paris décidait de dédier une avenue au cinéma, au modèle du « Hollywood Walk of Fame » de Los Angeles, une petite étoile au nom de Gérard Lebovici mériterait d’y briller. En hommage. Seul signe extérieur de notoriété.

 

 

Daniel Toscan du Plantier

 

(...)

Ce matin là, confrontés à l’absence, tous vont commencer à mettre en perspective l’œuvre et la personnalité de Toscan. Car Daniel Toscan du Plantier, est incontournable, et en évoquant sa vie au service du cinéma, ceux qui l’ont connu sont saisis de sentiments où la nostalgie semble toujours avoir sa part. Les réalisateurs mythiques avec qui il a travaillé et les tentatives artistiques audacieuses qu’il a risquées restent dans les mémoires.

 

Quant à moi, j’ai passé sept ans chez Gaumont sous sa direction, de 1978 à son départ en 1985. Il m’a donné ma chance, comme il l’a donnée à d’autres de ma génération qui ont été formés dans cette grande maison alors en ébullition. Ecouter et regarder cet homme brillantissime qui testait sa stratégie sur ses collaborateurs et semblait ne jamais arrêter son discours a été un apprentissage unique. Il ne se taisait que devant ses quelques maîtres, et devant les œuvres, films ou musique. Accessible, curieux, accueillant, il ne se montrait pas toujours fiable et n’hésitait pas à se détourner de qui le décevait ou ne l’intéressait pas. Mais en contrepartie il appréciait l’autonomie et l’esprit critique, et même l’insolence. Il m’a fait rencontrer des créateurs dont je rêvais depuis l’adolescence, m’a fait découvrir l’opéra autrement. Quelle école ! …

                                                     

Toscan au travail était un spectacle permanent en lui-même. Drôle et rapide, parfois il ne résistait pas l’attrait d’un « bon mot » assassin, qu’il acceptait aussi chez les autres.

Mais, ouvert au monde et enthousiaste, il a donné sa vie à l’art sans compter. Il a été adulé, admiré, critiqué, détesté… Il a été accusé de mille défauts et de fautes de gestion coupables mais il a permis à des oeuvres exceptionnelles d’exister. Il était de son propre aveu, amoureux de la musique par dessus tout : « J’ai toujours été très mélomane. La musique m’a plu avant tout, plus que tout, plus que le cinéma. »

 

Réputé peu soucieux des finances, il reçut comme indemnité de licenciement en 1985 de la part de Nicolas Seydoux la seule société de musique classique française qui vivotait encore avec peine à la fin du XXe siècle, Erato que Gaumont avait acheté pour produire la musique du film de Carmen ; et il la mena à la surprise générale au plus haut niveau international.

La musique également essentielle pour lui au cinéma, où il considère qu’elle « participe à l’image ».

Dans la seconde partie de sa carrière, son dévouement à l’intérêt général suscita un plus grand rayonnement du cinéma français dans le monde.

La liste de son générique personnel - les films et les œuvres musicales qu’il a initiés - mérite que même les plus sévères s’y attardent : En fin de compte, c’est ce qui reste !

 

Contrairement à Lew Wasserman et à Gérard Lebovici, Daniel Toscan du Plantier a ouvert sa vie personnelle aux yeux de ceux qui l’approchaient, sans ostentation mais sans protection, librement liée à son art et exposée. Séducteur dans le sang, ce n’est pas par hasard qu’il a choisi de produire « Don Giovanni » réalisé par Joseph Losey comme premier film d’opéra, suivi plus tard de « Carmen », son équivalent en jupons, confiée à la caméra de Francesco Rossi.

 

Il a aussi su garder les modèles de sa jeunesse en référence, et l’amitié, l’affection et l’amour de ses proches tout au long des années. Confronté à une tragédie personnelle, il a réussi à reprendre goût et foi en la vie…

 

Ces pensées traversaient mon esprit ce matin de février dont le souvenir reste fort. Depuis lors, loin de diminuer mon intérêt pour Toscan, le temps a apporté une distance qui m’aidera, je l’espère, à montrer le plus d’objectivité possible en écrivant ce portrait.

 

(…)

 

Séducteur absolu, aussi manipulateur que génial, ce géant du cinéma entraina un Toscan fasciné dans une ronde infernale et irrésistible. « Produire Fellini, c’est comme rester sur ces manèges qui tournent de plus en plus vite jusqu’au moment où la force centrifuge vous expulse », écrira Toscan, qui, après avoir produit trois de ses films, garda un amour mêlé d’amertume pour le maestro, « le compagnon le plus glorieux, le plus dangereux aussi »

Car Fellini, parfaitement à l’aise face au gouffre financier que ses oeuvres épiques suscitaient, estimait que les producteurs étaient tout simplement faits pour cela. Il le fait dire à un de ses personnages de « Huit et demi », le critique de cinéma Carini: « perdre de l’argent fait partie du métier de producteur… Il a eu ce qu’il méritait. » . (…)

Fellini faisait partie des quelques génies du cinéma tout à fait incontrôlables, comparable en cela à Orson Welles. Mais à la différence de Welles, il garda toujours le sens de son intérêt et parvint à captiver les producteurs les uns après les autres pendant toute sa carrière. Il se sentait entraîné au-delà de lui-même lorsqu’il entreprenait un film. Il disait lui-même : « Dès que je commence à travailler, quand je deviens cinéaste, quelqu’un prend ma place. Je deviens possédé par un mystérieux envahisseur ; un envahisseur que je ne connais pas prend les rênes du spectacle. Il dirige tout à ma place. J’apporte juste ma voix, mon sens artisanal, mes tentatives de séduction, mes idées ou mon autorité. Mais c’est un autre en vérité, pas moi, un autre avec qui je cohabite, mais que je ne connais pas ou que je ne connais que par ouï-dire. »

 

(…)

 

 

Dès son arrivée chez Gaumont, c’est sur un film étrange de Barbet Schroeder produit par Jean-Pierre Rassam, « Maîtresse », en 1975, qu’il rencontre Gérard Depardieu. L’acteur qui a été révélé peu de temps auparavant par « les Valseuses » de Bertrand Blier. Agé de 26 ans, il a le rôle principal dans ce film dont le sujet mêle érotisme, amour et prostitution. « Ce film surprenant fit entrer dans ma vie l’immense Gérard Depardieu, base fondatrice de mon travail et de tout le cinéma français. »

L’enthousiasme réciproque est immédiat. Au point que Depardieu entraîne Toscan bien vite dans une aventure mémorable avec Marguerite Duras, qui réalise elle-même l’adaptation cinématographique de son roman « Le camion ». Présenté par Duras, Toscan et Depardieu au Festival de Cannes 1977 sous les quolibets d’une salle bientôt désertée, le film est un échec absolu. Mais il rapproche le producteur et l’acteur, qui, au-delà des grands projets accomplis ensemble, ont en commun « ce sentiment qu’il nous faut refaire le plein, retrouver les sources de l’intelligence et de l’esprit en dehors des critères du spectacle et du box office. C’est ça aussi le cinéma. »

 

Toscan sentit tout de suite à quel point Gérard Depardieu possédait plus que quiconque cet art du grand acteur d’offrir à son public un talent nourri au fil des ans par les émotions intenses qu’il traverse dans sa vie : exposé à l’attente d’être choisi pas un metteur en scène, au jugement du public, il se remet en cause à chaque nouveau rôle qu’il enrichit de son mélange unique de fragilité et de puissance. Au delà du personnage qu’il incarne, Depardieu s’expose et nous livre son expérience humaine personnelle sans que nous nous en rendions compte. Sur les plateaux, s’extrayant soudain des présences autour de lui, il devient son personnage incarné. Un exemple mythique de ce pouvoir reste dans le métier à travers les âges. Sur le tournage de « Cyrano de Bergerac », insouciant, badin, turbulent, Depardieu chahutait avec l’équipe. Mais au signal de Jean-Paul Rappeneau, en un instant, Cyrano, sous les projecteurs, amenait des larmes aux yeux des techniciens médusés. (…)

 

Les relations tendues entre Gérard Lebovici et Daniel Toscan du Plantier ne facilitent pas le rapprochement professionnel de Depardieu et Toscan, malgré leurs affinités. Mais la rencontre avec Maurice Pialat (également représenté par ArtMedia) va sceller leurs liens pour toujours, au delà de la relation professionnelle intense. L’acteur et le producteur vont être unis par une amitié profonde. (…)

 

En voyant la lumière dans les images de Pialat, on ne s’étonne pas d’apprendre qu’il avait été artiste peintre avant de s’ouvrir vers le cinéma. (…)

La justesse et la force de son propos donnaient au passage un coup de poing au spectateur captivé.

« Ce qu’il y a d’admirable chez Maurice…(…)… il dit la chose qui est indicible.».  commentait Toscan.

Rapidement, Toscan ressent l’immense talent de ce cinéaste inclassable et attachant. « Le point tournant de ma vie s’appelle Maurice Pialat. Si Pialat me dit qu’il va raconter l’histoire de sa mère qui faisait des ménages quand il avait quinze ans, je suis d’accord. Il va raconter son enfance, la France de la guerre de 39-45, j’imagine d’avance, j’acquiesce, avec enthousiasme. D’emblée, Pialat a raison à mes yeux. »

 

(…)

 

« Si Maurice le veut, nous vieillirons ensemble »,  disait Toscan l’année suivante, prêt à oublier tous les soucis pour suivre le grand réalisateur qui, pour finir, ne l’avait jamais trahi à la différence d’un Fellini.

(Van Gogh)  fut pourtant leur dernière collaboration. Daniel Toscan du Plantier et Maurice Pialat disparurent tous les deux en 2003, l’un le 11 février et l’autre le 11 janvier, à un mois d’écart, laissant Gérard Depardieu dans le chagrin.

 

(…)

 

Pendant ce temps, Joe Losey travaillait à l’adaptation du livret de Da Ponte avec sa scénariste habituelle, sa femme Patricia. (…)Et voici qu’une équipe considérable était peu à peu engagée, et rejoignait Vicenza où la production s’était basée, à proximité des lieux de tournages repérés autour de Venise…

Voici que le décorateur Alexandre Trauner, le compagnon de Billy Wilder, de Jacques Prévert, de Marcel Carné, commençait à déployer sa magie, rendant les villas palladiennes et leurs environs à leur vie du 17e siècle, aménageant intérieurs, paysages et canaux vénitiens…

 

Toscan savait le coût de tout cela, mais voulait encore croire au fond de lui qu’il pouvait arrêter le film s’il ne trouvait pas de partenaires financiers. Il prit la décision finale de lancer la machine officiellement, seul à son bureau de Paris un vendredi soir où il apprit que Nicolas Seydoux ne pouvait pas être joint avant le lundi. Les dés étaient jetés. « Don Giovanni » était plus que jamais « son » film. « Ce jour-là, à cet instant-là, se fixait, bien malgré moi, ma façon de produire, le style même qui serait blâmé par ceux, nombreux, qui y voient l’essence de mon irresponsabilité, loué par quelques-uns qui savent par expérience la part d’aveuglement nécessaire à la création.»

Gaumont prenait donc la quasi totalité du risque financier.

 

Toscan se retrouvait ainsi l’interlocuteur en dernier recours de Joe Losey qui, anxieux et exigeant, connaissait bien les rapports de force avec les producteurs. Pendant le tournage, Daniel se rendit donc peu sur le plateau, pour ne pas affronter les demandes et les pressions de Joe au quotidien. De toutes façons, les plus importantes d’entre elles remontaient vers lui. Car le film ne rencontrait que des problèmes à son échelle, démesurés, qu’il devait en fin de compte affronter tous les jours.

 

Cependant même face aux pires incertitudes de ce tournage diabolique, les angoisses croissantes de DTP ne s’apparentaient pas à un sentiment de danger existentiel comme peuvent en connaître des entrepreneurs responsables de leurs finances sur leurs propres biens. Il ne sentait pas de menace. Gaumont venait d’initier sa nouvelle stratégie d’ouverture vers l’étranger et semblait disposer de ressources illimitées à cette fin. Nicolas Seydoux suivait son directeur général sans états d’âme. Opéra films, la filiale italienne crée à l’occasion de « Don Giovanni », allait bientôt commencer la production des films de Fellini. L’optimisme sur l’avenir de la société régnait même si l’inquiétude autour des dérapages du film montait en flèche.

 

(…)

 

Le tournage s’éternisait. L’été s’achevait. Le froid et l’humidité arrivaient. Les scènes de nuit devenaient éprouvantes. Losey, massif et peu loquace, se réchauffait à la vodka, et faisait sucer des glaçons aux pauvres chanteurs pour éviter la buée de leur souffle à l’image. Il grognait à tout propos, agressait parfois certains représentants de la production et créait des tensions entre les talents multiples réunis sur un même plateau.

Les retards décalaient le plan de travail des chanteurs, établi au cordeau, qui devait leur permettre de respecter leurs engagements de scène à travers le monde. Les changements de dates obligèrent la production à emmener l’un ou l’autre rejoindre son spectacle en avion privé puis le ramener au plus vite à Vicenza. Le budget explosait.

Mais même ravagé par les soucis, chaque fois qu’il vint sur le plateau gérer des situations de plus en plus préoccupants, Toscan ressentit une joie et une fierté : « …Je me débarquai un matin sur la place des Seigneurs et ….(…)…je me retrouvai dans un café visiblement débordé par la longue nuit de tournage. Seul avec le directeur de production, nous recomptions lamentablement les milliards qui s’envolent. Une fille balaie la salle à manger, elle chantonne ‘laci darem al mano’. Elle semble heureuse. Mozart a gagné, nous aussi. Don Giovanni a changé ma vie. »

 

(…)

 

Quand ce matin de printemps 1985, Nicolas Seydoux apprend à Daniel Toscan du Plantier que cette fois, il doit quitter Gaumont brutalement, le directeur général est abasourdi. Les mots de Nicolas sont brefs : « Nous ne pouvons plus continuer ». C’est une claque. Le Conseil d’Administration, auquel Toscan n’assiste pas, commence quelques minutes plus tard et va le licencier. Il connaissait l’ampleur des pertes, mais pensait que le Président, son ami, le soutiendrait. Mais les actionnaires hostiles ont gagné. L’aventure est finie.

Depuis longtemps le Conseil le guettait. Un de ses membres, Paul Lepercq, proche de Jean Riboud, se montrait parmi les plus virulents contre la politique de Toscan et ses choix. Il faisait campagne contre lui. Un autre conseiller de Riboud, Claude Balks, un homme à l’aspect négligé à l’apparence d’un gentil clochard, promenait son humour caustique dans les couloirs de Gaumont, échangeant avec les uns et les autres des informations et des commentaires sur la situation et le nombre d’entrées des films. Au passage, il distillait insidieusement du fiel contre Toscan. Alors qu’il critiquait une fois de plus les résultats commerciaux des productions signées DTP, Denis Chateau lui répliqua « Mais ‘Cousin, Cousine’, tout de même ! » pour s’entendre répondre « même une poule aveugle arrive à picorer un grain ». (…)

 

La dernière année de Daniel Toscan du Plantier chez Gaumont fut celle de « Police » de Pialat, interprété (…) par Gérard Depardieu, avec Sophie Marceau. A la suite des pertes colossales générées sur l’étranger, DTP fut licencié juste avant la sortie réussie du film cette année là.

 

L’intimité et la complicité entre Toscan et Depardieu se renforcèrent encore le jour du renvoi du producteur (…)

Toscan raconte cette journée qui illustre parfaitement cette amitié et la force d’intervention de la star. « On m’a dit ça vers 9h du matin, qu’il fallait que je parte…(…)…Et puis le soir même- y avait à cette époque là une émission vers 7h sur Canal +- j’ai vu arriver dans mon bureau Gérard Depardieu qui, je crois est du monde l’interprète qui m’est le plus proche, le plus fraternel, qui m’a dit : viens avec moi.

Et puis…il n’a pas dit un (mot). Je dois dire qu’en fin de journée, je me disais, quand même, j’ai fait 10 films avec lui, ça valait bien un petit coup de fil parce que si j’étais tombé, c’est aussi à cause , et avec tous ceux qui avaient fait des films avec moi .

Il m’a emmené à cette émission qu’il avait organisée dans l’après midi. Il avait mis des extraits d’une trentaine de films auxquels j’avais été mêlé. Et puis il a passé des extraits comme ça, et puis en partant, à la caméra,  il a dit comme ça : Ben voilà, sans lui, y aurait pas tout ça ».

 

 

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